Au deuxième étage du 9, quai André Lassagne, cinq salles et espaces de vie accueillent les coworkeur·ses fixes ou nomades de l’ADM. À chacune son caractère et son ambiance ! Visite guidée.

Un ancien appartement de plus de 200 m2 tout en parquet qui craque, moulures rococos et recoins mystérieux, des plantes partout, d’élégantes photos au mur, la vue sur le Rhône… Pas étonnant que ce soit par une visite guidée que débutent la plupart des « colunchs », ces repas qui permettent aux intéressé·es de découvrir le fonctionnement de l’Atelier des médias avant de sauter le pas. Quel sera votre espace de travail ou lieu de vie préféré ? Aperçu subjectif par des habitué·e·s.

#Le Grand Palais

Principale pièce de vie de l’ADM, le Grand Palais est partagé en un espace bureau et un espace repas où tout le monde déjeune sur deux immenses tables en bois dans un joyeux brouhaha. Au printemps 2023, l’harmonie bienveillante et apaisée de la salle a été menacée. Il y eut des crises de larmes, de rire et d’épilepsie. On entendit des « Oh ! », des « Aaah ? », on vit surgir des cœurs dans les yeux et des haut-le-cœur. La raison ? Un nouveau Canapé™ qui ne laisse, aujourd’hui encore, personne indifférent — à juger sur place, les mots nous manquent — mais fait l’unanimité de tous les postérieurs qui s’y sont posés. Si toi aussi, public, tu veux découvrir cette œuvre mobilière, n’hésite pas à venir coluncher.

Le Grand Palais est aussi le témoin du meilleur et du pire des apéros des nouvelles et nouveaux, des AG et des événements festifs de l’ADM.

Les + : les belles tablées, les croque-monsieur 5 étoiles, les ateliers en tout genre, bref, le cœur de l’Atelier.

Le – : espace de travail aux horaires atypiques, la concentration étant héroïque aux heures des petits-déjeuners, déjeuners et soirées diverses dès 19 h.

Phrase la plus entendue : [inaudible].

Usage inattendu : terrain de ping pong avec tout sauf des raquettes.

Le mystère : en observant des photos de l’ADM d’il y a dix ans, on constate que les coworkeur·euses qui travaillent au Grand Palais semblent étrangement échapper au vieillissement. À creuser.

#La cuisine

Sans doute la pièce la plus « vintage » de l’atelier. On se croirait littéralement chez mémé, peut-être à cause du mobilier en formica. On vient y prendre un café et on y reste pour discuter avec un·e autre coworkeur·euse venu·e se faire un thé… ou pour aider les nouvelles et nouveaux à faire face au terrible clignotement rouge de la machine à café — rajouter de l’eau, vider le bac, la secouer en hurlant… Le temps que votre café coule, vous pouvez aussi faire « une action » pour la collectivité : essuyer des assiettes, ranger les mugs et les couverts… Entre midi et deux, c’est ici l’heure de pointe et trois micro-ondes ne sont pas de trop pour réchauffer tous les casse-croûtes. Le ménage du frigo est régulier, mais on y trouve tout de même des confitures — toujours délicieuses — d’anciennes ou d’anciens pas vu·e·s depuis plusieurs années. C’est aussi un lieu de partage et d’échanges, car oui, comme dans tous les bureaux, nous avons des cancans, des ragots, du drama, des bruits de couloir et des problèmes d’articulations à partager.

Les + : l’étage « servez-vous » du frigo, le placard du bas avec le chocolat en poudre, le mug de la famille royale, la machine à soupe.

Le – : la pyramide de vaisselle et les moucherons occasionnels au-dessus de l’évier.

Phrases les plus entendues :

Qui a jeté mon tzatziki ? Il était encore bon !

Il est à qui ce tupperware ?

Stéphane, c’est toi qui as pris ma pomme ?

Usage inattendu : salle de réunion de secours, annexe prisée des soirées.

La légende : si tu acceptes de laver le tupperware de la personne qui te suit dans la file d’attente devant l’évier, le karma te dispensera de la prochaine mission verre.

#Versailles

Le nom claque et tient toutes ses promesses. Plafond haut avec moulures, lumière du jour du matin au soir… c’est la pièce « whaou ! » de l’Atelier. Les lustres sont toujours allumés car pour une fois, c’est effectivement Versailles, ici. La moquette et les hipsters travaillant sur Mac rappellent qu’on est plus au temps de Marie-Antoinette — ou alors celle de Sofia Coppola. C’est le bureau des lève-tôt qui foncent sur les meilleures places, aux dépens de celles et ceux qui se permettent une grasse matinée un mardi matin. De nombreux aspirant·es à un bureau fixe convoitent cette pièce, mais la liste d’attente est longue. Toute tentative de soudoiement — « J’ai fait ce gâteau au chocolat spécialement pour vous », « Vous voulez que je gère le compost ? »… — est inutile : l’équipe Cueillette, ex-Recrutement, est inflexible. Les titulaires de bureaux fixes restent cependant vigilant·es. Un accident de fléchettes est si vite arrivé.

Les + : luminothérapie été comme hiver, balancement lent des lampes japonaises dans le vent, dépaysement spatio-temporel garanti.

Le — : la moquette, le réglage des stores à lamelles diaboliques. Une compétence utile à mettre en avant lors d’un colunch.

La légende : une souris aurait été aperçue dans cette salle il y a six ans, mais selon Wikipédia, la durée de vie maximale des souris est de quatre.

Phrases les plus entendues :

Oh, le coucher de soleil

Oh, une manif

Quelqu’un a un chargeur ?

#Le couloir

À la confluence de tous les espaces — et passage obligé pour se rendre aux toilettes —, le couloir est un haut lieu de sociabilité de l’ADM. C’est là que l’on trouve les casiers jaunes à cadenas des coworkeurs, avec leur jardin secret façon collège des séries américaines : Switch, tricot en cours, petits gâteaux, bouillotte, affaires de sport pour se donner l’illusion naïve qu’un jour on ira courir sur les quais entre midi et deux, mais pas aujourd’hui.

Le + : le charme du parquet qui grince et annonce les visiteur·ses.

#La salle de réunion

Un coworking sans salle de réunion, c’est un peu comme une soirée AG sans déguisement  : sympa, mais il manque un truc. La porte vitrée offre une petite distraction — « Coucou ! ». L’astuce pour être sûr·e qu’une réunion ne s’éternisera pas consiste à réserver un créneau serré pour pouvoir ensuite dire à Jean·ne-Michel·le en visio : « Désolé·e, je dois libérer la salle » en montrant un coworkeur/une coworkeuse qui s’impatiente derrière la vitre. Sous les grands tirages inspirants de photographes de l’ADM, c’est ici que se réunissent chaque mois les éminents membres du conseil d’administration de l’association. Ou que se tiennent les petit-déjeuners métiers, les Coop of’ — partage de pratiques pro — ou les ateliers pop-up ou linogravure du midi.

Le + : on peut y faire des réunions.

Le – : les réunions

Ambiance sonore : ronflement zzz, soupir, notification de SMS, toc toc sur la porte, poc du débouchage de bouteille.

Usage inattendu : vestiaire lors des soirées.

#Le Petit Trianon

Située face à la porte d’entrée et donnant accès au balcon, la salle voit passer du monde : les fumeur·ses, les adeptes du café ou des pauses avec vue… mais pas encore de Marie-Antoinette à l’horizon. Lors des soirées, le Petit Trianon fait littéralement office de couloir. En semaine, les places sur les chaises hautes, style « au comptoir », sont prisées par celles et ceux qui veulent avoir l’impression qu’ils ne vont pas passer leur journée à travailler. Les habitué·es du Petit Trianon le savent : ils sont un peu les agents d’accueil de l’ADM, ouvrant tour à tour la porte aux livreur·ses, la personne en charge du ménage et aux « passagères » ou « passagers »… ces ancien·nes de l’ADM qui reviennent régulièrement travailler/déjeuner/dire bonjour.

Le secret : les coworkeur·ses du Petit Trianon savent qui fume à l’ADM, et aussi qui a arrêté le 1er janvier… et repris le 18.

Le + : travailler en petit comité et pouvoir rêvasser en regardant dehors.

Le – : le bruit de la porte d’entrée qui claque et reclaque.

Phrase la plus entendue :

« Tu vas ouvrir ou j’y vais ? »

#Les traboules

Ces trois « box » côte à côte, style opérateur·rices téléphoniques des années 50, sauvent régulièrement les coworkeur·ses qui doivent répondre à un appel sans avoir eu le temps de réserver de salle. En effet, à l’ADM comme à la SNCF, on ne répond pas aux appels n’importe où pour ne pas déranger les autres.

Les + : permet de voyager sans bouger car on y entend toutes les langues. Permet aussi d’espionner discrètement ce qui se passe dans les bureaux en faisant mine de traverser le couloir d’un air inspiré.

Le – : la quatrième planche sur la gauche qui grince.

Phrase la plus entendue :

« Non, je ne peux pas parler plus fort. Il y a quelqu’un en visio à côté de moi ».

#Le board

Versailles en version intimiste. Les places y sont moins nombreuses — cinq postes seulement — et donc plus chères. Il semble que l’on boive ici du thé russe en parlant de problèmes du grand âge toute la journée. Certain·es sont vu·es si souvent dans cette salle qu’on les appelle les « boardistes ». Si on les trouve un matin, le regard dans le vague, dans un autre open space, c’est forcément parce que le board était complet à leur arrivée, ce qui arrive souvent : la vie de boardiste n’est pas facile quand on arrive à 11 h.

Le + : on peut y ricaner toute la journée.

Le – : étrangement, ricaner toute la journée n’aide pas à boucler ses projets à temps.

Phrase la plus entendue : rires, chuchotements et tintements de tasses.

Le mystère : personne ne sait pourquoi cette pièce porte ce nom car jamais aucun·e PDG, ni actionnaire n’y a mis les pieds.

#Le bocal

La pièce de 2,5 m2 — à tout casser — doit son nom à la grande porte vitrée qui, une fois fermée, vous sépare du reste de l’ADM — et du monde — tel un poisson pris dans les filets d’une interminable visio. L’espace a été optimisé au mieux pour contenir tous les accessoires indispensables à une looooongue réunion : table ronde imitation bois, lampe d’interrogatoire, moquette de couleur indéfinie avec nombreuses taches de matière indéfinie. Il y a une chose à savoir quand on est dans cette salle : oui, on peut ouvrir la fenêtre mais attention, non, on ne touche pas au thermostat du radiateur — et pas l’inverse, d’accord ?

Le + : on peut y téléphoner impunément sans déranger ses petit·es camarades.

Le moins : devoir résister à l’appel des quais qu’on voit depuis la fenêtre pendant une visio qui s’éternise.

Fond sonore : le bruit de la mer — si on ferme les yeux, le bruit de la circulation sur le quai si on les garde ouverts.

La légende : y tenir à deux pour une réunion de plus de deux heures rendrait fou.

#La grotte

Comme dans les contes pour enfants, la pièce est bien cachée et fait un peu peur mais elle ne cache pas de monstre… sauf [censuré] quand il n’a pas bu son café du matin. Salle clivante : il y a celles et ceux qui adorent et celles et ceux qu’on n’y voit jamais. Écosystème parfaitement adapté aux peaux les plus fragiles, déconseillé à ceux qui vivent de la photosynthèse. Hors de leur habitat, on reconnait les habitué·es de la grotte à certains indices : pull en laine et mug de thé fumant même en pleine canicule — accessoires supplémentaires de septembre à avril : bouillotte, mitaines, bonnet en laine et damart —, ou encore air ébloui et pupilles contractées — voire lunettes de soleil — en toute saison dans le reste du coworking.

Le + : la solidarité des habitant·es de la grotte, on se serre les coudes pour ne pas sombrer dans la dépression et on allume la lumière à 14 h 30.

Le – : les gens qui te tapotent l’épaule d’un air contrit quand ils apprennent que tu es installé·e dans la grotte.

Phrase la plus entendue :

« Mais qui a éteint la lumière ? »

Légende : il se dit que si que si toutes les places sont prises, il reste TOUJOURS au moins une place dans la grotte — non valable l’été, cf. « usage inattendu ».

Usage inattendu : lieu prisé pour sa fraicheur l’été. Les habitué·e·s ne manquent d’ailleurs pas de juger les jeunes hipsters qui viennent s’y réfugier par grande canicule, en rappelant à qui veut l’entendre qu’ils/elles étaient là avant que ce soit cool.

#La cabine

À ne pas confondre avec les cabinets, la cabine est la dernière née des salles de l’ADM, arrachée à un placard durant un « week-end ADM », ce rendez-vous annuel façon « grand rangement de printemps » au cours duquel tout le monde se retrousse les manches dans la bonne humeur pour donner un coup de frais à l’atelier. Dans cet ancien réduit, chaque mouvement doit être anticipé et les grands gabarits doivent choisir : étirer ses jambes ou ses bras, mais pas les deux en même temps. Le nombre d’heures passées dans la cabine peut-être déduit de l’entrainement officiel de la NASA pour devenir astronaute.

Le + : l’impression d’être Youri Gagarine derrière son hublot en 1961, petits boutons qui clignotent inclus… ou (si ça se passe moins bien) Major Tom dans Space Oddity. D’ailleurs, la sortie de la cabine donne l’impression de revenir sur Terre après un long séjour dans l’espace.

Le – : votre interlocuteur en visio qui demande à plusieurs reprises « Mais tu es où, là, exactement ? » Le manque d’oxygène est un motif valable pour mettre fin à un appel qui s’éternise. Pièce interdite aux claustrophobes.

Phrases les plus entendues (dans la tête seulement) :

This is Major Tom to Ground control

Il se passe quoi au juste si je touche au fil bleu ?

C’est normal cette diode qui clignote ?

La légende : pièce trop récente encore pour cette rubrique !

#Les cabinets

Contrairement à ce que leur nom indique, on n’y passe — a priori — pas d’appels téléphoniques. Les miroirs permettent de checker qu’on n’a pas un bout de persil coincé entre les dents avant une visio ou de s’entrainer à refuser la demande d’un·e client·e de lui faire « un petit prix » (« Are you talking to me ? »). L’affiche « on aime les saouls » invite à la méditation… ou aux souvenirs. À la recherche d’un·e ostéo, d’un·e masseur·se, d’un·e couturier·ère ou d’un·e coiffeur·se ? On pioche — presque — les yeux fermés dans la pile de cartes de visite laissées à disposition par les coworkeur·ses. On peut aussi méditer devant des phrases inspirantes entendues au gré des salles.

Le + : il y a toujours de la lecture.

Le – : le risque — rare — de n’avoir pas anticipé une pénurie de PQ… à aller chercher à l’exact opposé l’ADM, dans la cuisine.

Phrase la plus entendue :

Revenez avec un mandat !

quand quelqu’un essaie d’ouvrir la porte manifestement fermée.

Alors, vous venez ?